Genre : Action débridée/No Mercer !/Et toi, c’est quoi ton super-pouvoir ?
Supports : PS3, Xbox 360, PC
Editeur : Activision
Développeur : Radical Entertainment
Date de sortie : 24 avril 2012 (PS3, Xbox 360)
24 juillet 2012 (PC)
PEGI : 18
Prix : 70 € (PS3, Xbox 360)
50 € (PC)
« A grands pouvoirs, grandes responsabilités ».
Depuis le Spiderman réalisé par Sam Raimi, cette maxime vaut pour tous les super-héros, et bizarrement aussi un peu pour nous, testeurs de jeux vidéo, vu qu’en règle générale les éditeurs ont l’élégance de nous faire parvenir gratuitement un exemplaire de leurs derniers jeux afin que nous puissions en faire les chroniques, ce qui, en substance, veut dire qu’il est important de ne jamais oublier que nos ludothèques (à nous chroniqueurs) s’agrandissent de manière exponentielle sans que cela nous coûte un centime là où toi, public, va peut-être compter sur nos avis (magnanimes ou non et objectifs ou pas) avant de délester ta bourse de plusieurs dizaine d’euros. Mais ce qui est sûr c’est que si tu veux un jeu, toi tu passeras à la caisse.
Aussi il est – justement – primordial de bien conserver à l’esprit la notion d’objectivité quand on passe un soft au banc d’essai, sachant bien entendu que cette notion n’ira pas sans une certaine part de subjectivité, et qui vise à répondre le plus sincèrement possible à cette simple question : ce jeu est-il fun, et si oui (ou si non), pourquoi ?
Dans le cadre du titre qui nous intéresse ici, Prototype 2, la réponse est définitivement oui.
Pourquoi ? Parce que c’est toujours le pied de pouvoir incarner un personnage doté de pouvoirs hors du commun qui lui permettent de faire des trucs pas possibles en détruisant tout autour de lui, surtout quand c’est bien fait et que l’on prend un kif pas possible à être l’auteur d’exactions qui vont coûter bonbon à la municipalité.
Puéril ? Certes certes, mais c’est bien pour ça aussi qu’on aime les jeux vidéo, non ?
Et pour ce qui est de foutre un dawa monstrueux en ville, le sergent James Heller est particulièrement efficace.
En effet, ce militaire a hélas tout perdu lorsque sa femme et sa petite fille succombèrent à la deuxième infestation de la ville de New York par un virus relâché par un certain Alex Mercer, scientifique ayant lui-même développé des supers-pouvoirs à la suite d’une première infestation, et accessoirement personnage principal du premier Prototype, jeu sorti il y a trois ans et qui rencontra alors un joli succès, notamment grâce à son ambiance comic-book et à sa violence décomplexée.
Heller considérant Mercer comme principal responsable de la perte de sa famille, il n’a plus qu’une idée en tête : le tuer. Et l’occasion lui en même donnée dès le début du jeu, mais aveuglé par la colère et son désir de vengeance, Heller ne réalise pas à quel point Mercer lui est physiquement supérieur et se retrouve à deux doigts de se faire écraser comme une vulgaire mouche, quand étrangement Mercer choisit non pas d’éliminer le soldat, mais de lui prodiguer une partie de ses pouvoirs, avant de disparaître. Complétement désorienté par la tournure qu’ont pris les événements, Heller va alors utiliser ses nouvelles capacités pour en savoir plus sur les motivations de Mercer et lutter contre les autorités militaires et le sinistre groupe d’intervention Blackwatch qui, en instaurant la loi martiale, ont divisé la ville en trois zones et semblent bien être partie-prenante d’une gigantesque machination visant à tester les effets d’un virus mutagène à l’échelle de New York (rebaptisée ici New York Zero), réduisant soudain ses habitants au rang de cobayes.
Prototype 2 fait partie de ces jeux qui, un peu à l’instar du très réussi Darkness II, ne lésine pas trente secondes à tout sacrifier sur l’autel du « toujours plus » grâce à une panoplie de super-pouvoirs qui offrent à Heller des possibilités qui en foutent toujours plein la vue. Que ce soit courir à la verticale le long des façades d’immeubles, effectuer des sauts hallucinants avant de planer au dessus de la ville et de retomber lourdement sur le sol en fissurant le bitume, ou attraper n’importe quel véhicule qui traine pour le balancer sur un hélico un peu trop collant, il n’y a quasiment aucune limite à ce qu’il peut faire. Mais mieux encore, non seulement Heller va régulièrement avoir l’occasion de faire monter en puissance ses pouvoirs de base, mais il va en gagner beaucoup d’autres au fur et à mesure de son périple, à coup d’XP comme dans un bon RPG. Ainsi si au début il est bien pratique d’expédier un véhicule sur un char ou un hélico pour entamer sa carcasse, c’est encore mieux de pouvoir au bout d’un moment grimper sur le char pour arracher son canon-tourelle avant de le faire exploser avec, ou de bondir sur le gros moustique pour le mettre en charpie. Je ne passerai pas ici en revue la liste complète des possibilités qui s’offrent à Heller, mais sachez qu’elle est impressionnante et surtout, qu’elle offre des moments de destruction pure et un sentiment de toute puissance absolument jouissifs, d’autant plus que le rendu visuel des exactions du héros ne fait pas non plus dans la dentelle. Ça explose de partout et surtout, ça gicle ! Car Prototype 2, tout comme son grand frère, est un jeu à la violence graphique assumée, version carrément gore et dark-fantasy, où même les innocents passants peuvent en prendre pour leur grade, étant donné que pour régénérer sa barre de vie, James Heller doit absorber d’autres formes de vie et qu’il n’y a pas toujours de monstres ou de bad guys à proximité en cas de besoin (sans parler des dommages collatéraux que peuvent subir les badauds en cas de destruction massive et sanguinolente de la voirie). Prototype 2 fait ainsi preuve d’une méchanceté « hardcore » dont personne ne ressort indemne, magnifiée par des effets visuels assez forts, comme ces images de corps éclatés à l’extrême par d’organiques excroissances toutes droit sorties d’un film de Cronenberg ou de The Thing de Carpenter.
Par exemple, et compte tenu du fait que le personnage de Heller est activement recherché par toutes les forces armées de la ville, il est toujours surprenant de constater qu’aucun militaire ni – pire – aucun membre du groupe Blackwatch ne tilte quand le paria atterrit à côté de l’un d’eux après un plongeon de 50 étages, ou qu’ils ne s’offusquent de rien quand il se met en devoir de gravir, sous leur nez, une façade d’immeuble en tapant un sprint à la verticale.
Plus dommageable, pour le joueur, sont les phases d’infiltration ne présentant que peu de risque de se faire accrocher. En effet – et à l’instar d’Alex Mercer dans Prototype -, James Heller peut assimiler n’importe quel être vivant d’un simple contact, et ensuite usurper son identité (et sa mémoire), ce qui sert dans le jeu à la fois à se rendre incognito lorsqu’il est poursuivi (là ça fonctionne très bien), et à infiltrer des complexes de recherche militaro-industriel où il cherchera des réponses à ses interrogations et/ou à déjouer les plans méphitiques des autorités. Or dans certains cas (et pas que en phase d’infiltration d’ailleurs), il lui faut tenter d’usurper l’identité d’une proie alors que cette dernière est dans le champ visuel d’un (ou de plusieurs) gêneur(s) potentiel(s), garde ou autre, et pour savoir si c’est le cas il dispose d’un sixième sens – une sorte de radar – qui lui indique si la cible est isolée et donc éligible ou non pour une assimilation.
Pour réussir il faut que Heller attende que le(s) gêneur(s) en question s’en aille(nt), ou assimile d’abord ce(s) dernier(s) pour pouvoir ensuite revenir en paix à sa victime principale, ce qui sur le papier laisse présager de possibles bonnes montées d’adrénaline. Hélas, ce concept plus que sympa se retrouve noyauté par l’impossibilité pure et simple d’assimilation dans le cas où l’objectif serait sous surveillance (un message apparaît alors indiquant que ce n’est tout simplement pas possible, du coup le risque de rater sa mission avoisine le zéro absolu).
Un choix de gameplay franchement dommage car il fiche en l’air ce petit côté Metal Gear vraiment bien vu dans le jeu, et donne un peu trop l’impression qu’à la longue ce genre de mission va systématiquement relever de la promenade de santé, ce qui est hélas le cas.
Le radar offre par contre une alternative des plus intéressantes, même si l’on a un peu de mal à en saisir le fonctionnement dans les premiers moments du jeu. Comme Heller a la possibilité de se livrer à tout un tas de quêtes annexes lui permettant d’en savoir plus sur le pourquoi du comment de la situation, et qui surtout – une fois exécutées – pourront augmenter ses pouvoirs, il peut se glisser dans la peau (toujours usurpée) d’un officiel pour ensuite aller pirater les systèmes de communication des forces armées et ensuite apprendre qu’il doit se mettre en chasse d’un personnage particulier pour pouvoir avoir connaissance de ce que celui-ci savait. Et pour retrouver le quidam en question, au beau milieu de la grande pomme, Heller doit déclencher son radar, qui fonctionne alors comme un sonar. En gros, il envoie une sorte d’onde visuelle qui lui revient à partir de l’épicentre qu’est sa proie. Le but du jeu étant ici de surveiller les alentours lorsque l’on envoie l’onde pour voir d’où elle se redéploie. C’est un tantinet coton au début mais c’est avec plaisir que l’on constate que l’on se fait très rapidement au système, qui donne vraiment l’impression de partir « en chasse ».
Très fortement typé comic-book, Prototype 2 doit aussi beaucoup au charisme de ses principaux protagonistes et à leur relation/antagonisme typique du genre super-héros/super-Némésis (sauf qu’ici et pour une fois, c’est le premier qui est issu des actions du second). Et une des meilleures idées pour cette suite est que Radical Entertainment a justement décidé de confier le rôle principal de ce second opus à un tout nouveau héros et faire du perso qui était jusqu’ici emblématique de Prototype un alter-ego maléfique, chamboulant ainsi l’ordre établi qui voudrait qu’un héros de jeu vidéo le soit de façon immuable et récurrente pour les épisodes à suivre.
Et on notera également que James Heller est non seulement une vraie gueule, mais c’est aussi un des rares héros black de jeu vidéo, et sa personnalité revancharde et son franc-parler font parfaitement écho au personnage plus mystérieux et trouble qu’est Alex Mercer. Le chara-design des deux mastards réussit en outre l’exploit de leur donner un cachet particulier, de sorte à ce que la tenue « street-wear » qu’ils arborent chacun (jeans et blouze en cuir pour Heller, sempiternel hoody à capuche relevée pour Mercer) finit par devenir pour l’un et l’autre comme une panoplie significative de leurs rôles respectifs.
Donc j’ai choisis et je me contenterai de dire que Prototype 2, malgré ses menus défauts et une certaine répétitivité dans sa structure, est incontestablement un jeu épique fait avec amour, par des mauvais garçons, pour des mauvais garçons, et – encore une fois – procure le même genre de plaisir que Darkness II, à savoir être un excellent défouloir « over the top » qui permet de se dire pendant qu’on y joue : « je suis un super badass motherfucker, now come get some ! », un peu à la façon (mais en plus cru) de ce que que promettait l’affiche du Superman de Richard Donner en 1978 qui titrait « you’ll believe a man can fly ! »
Dans les deux cas je l’ai cru, et je n’ai pas été déçu.